Comment ne pas être révolté par la barbarie du crime commis en Algérie contre Hervé GOURDEL ?
C’est bien évidemment à sa famille à ses proches que vont nos pensées.
Mais cela nous interpelle, car il ne suffit pas de constater une horreur : il faut réfléchir pour tenter de comprendre l’engrenage qui a "permis" d’en arriver à une telle situation, et que faire pour que cela ne se reproduise plus.
Pendant des siècles la colonisation, sous couvert de "civilisation" d’indigènes, a humilié de nombreux peuples pour mieux les exploiter et les spolier de leurs richesses naturelles.L’exemple français à ce sujet est significatif. En effet, quand "officiellement" (juridiquement) les colonies sont devenues "indépendantes", la France a maintenu son emprise économique, politique. Elle n’a jamais encore reconnu sa responsabilité dans les crimes d’état (17 octobre 1961, Charonne, assassinat de leaders anticolonialistes, indépendantistes... comme Ben-Barka, Curiel, Sankara Lumumba...), les crimes contre l’humanité (colonialisme, et tous ceux commis pendant les conflits de libération : torture, viols, crevettes Bigeard, utilisation du gaz sarin et Vx, camps d’internements, corvées de bois, villages rasés au napalm,..) ni évidemment ne les a condamnés. Tout particulièrement en Algérie, le comportement de l’armée, avec la caution politique des gouvernements d’alors, a très souvent humilié la population musulmane. En particulier les viols, principalement des femmes mais souvent des hommes, ont été employés comme moyens de torture, justement parce que ces actes avaient encore plus d’impacts pour des musulman(e)s du fait de leur religion.
Nous ne devons pas oublier que, même depuis les indépendances "juridiques", la France a poursuivi sa domination politique, économique dans la plupart de ses anciennes colonies. Lors d’un voyage en Côte d’Ivoire dans les années 1990, j’avais été frappé par l’expression employée les "bounties" (faisant référence à ces friandises) : c’étaient des noirs qui se comportaient comme les blancs. La misère imposée aux peuples d’Afrique par une économie (La Françafrique) dictée par la France fait des ravages : le système bancaire dépend des baques française, le franc CFA dépend du bon vouloir de la Banque de France. En 1984, il a été dévalué de 50%, sans aucune concertation avec les pays concernés.Cela a généré une misère terrible, une impossibilité pour les états dits indépendants de développer des services publics : armée, police, éducation, santé... Cette misère ne peut qu’engendrer une réaction de victimisation. C’est le terreau pour la génération d’extrémismes, utilisant si besoin les prétextes religieux. Dans toutes ces anciennes colonies, les multinationales dites françaises (Total, Bollorée, Aréva....) pillent allègrement les richesses naturelles, sans retombées économiques pour les peuples, seulement une corruption des dirigeants mis en place pour pouvoir continuer.
Tout cela n’empêche pas nos présidents, depuis une dizaine d’années de donner des leçons de droits de l’Homme. François Hollande, dans ce domaine aussi, reste dans la ligne sarkoziste. Comme Bush, cette notion de guerre de civilisation, même si le terme n’est plus vraiment utilisé, se poursuit. Ce prétexte, le même que pour institutionnaliser le colonialisme hier, cache en fait un "besoin" de déstabilisation des états pour que les multinationales puissent contrôler le pétrole, l’uranium... en vendant des armes, et imposant des "reconstructions" des pays ravagés par ces conflits.
Comment peut-on penser que ce sont par les armes que l’on peut endiguer des idées, imposer le "bonheur" aux populations soumises à ces extrémismes. Bien au contraire, en en faisant des victimes, on génère des aspirations à la multiplication de volontaires djihadistes. Ceci d’autant plus que l’islamophobie s’est encore accentuée à partir des attentats de septembre 2001. Le "résultat" en Afghanistan est éloquent : après avoir utilisé les talibans pour chasser le pouvoir pro-soviétique, mené une guerre pour "éradiquer" le terrorisme islamique qui "sévissait" dans certaines régions de ce pays, les talibans sont désormais au pouvoir. Qui oserait citer un seul exemple d’un pays où la démocratie a été instaurée par les armes ?
Sadam Hussein ou Mouammar Kadhafi ont été des chefs d’états adulés pendant des années, reçus avec les honneurs, jusqu’au jour où ils sont devenus "encombrants". Les opérations militaires menées pour s’en "débarrasser" n’ont généré qu’une catastrophe complémentaires au peuples concernés, et le terrorisme "religieux" n’a pas été éradiqué, mais bien au contraire attisé.
Les interventions française au Mali ou en Centrafrique, qui ne devaient durer que quelques mois, ne sont pas prêtes à s’arrêter.
L’accumulation des conflits, sous prétexte d’éliminer le terrorisme (même s’il prône un visage déformé de la religion) n’est pas prête à établir une paix réelle sur notre planète. Certes en déstabilisant les états, les multinationales peuvent poursuivre leur œuvre de prédateurs, mais la misère ainsi générée ne peut que faire germer parmi les victimes une volonté de violence parce qu’elles estiment ne rien avoir à perdre. Alors si un fanatisme, sous couvert de religion, leur apporte une bribe d’espoir, le recrutement de djihadistes devient "naturel".
Ces milliards gaspillée dans ces guerres, ces armements pourraient être mieux utilisés, en permettant de faire reculer la misère, la violence qu’elle engendre.
Utiliser aujourd’hui ce crime odieux, bouleversant, pour justifier la poursuite d’un conflit sans issue, est abject, je crains bien qu’il en annonce une longue série à venir.
0 | 5