Henri POUILLOT
Guerre d’Algérie, Colonialisme...
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Mon intervention au Pont Saint Michel du 17 oct 2011

Au nom du MRAP, je suis intervenu à l’occasion de ce 50ème anniversaire de ce crime d’État

Article mis en ligne le 18 octobre 2011
dernière modification le 2 décembre 2012

par Henri POUILLOT
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Il y a 50 ans des centaines d’Algériens étaient assassinés par la Police de notre République, ici, sur ce Pont Saint Michel en plein centre de Paris, et dans plusieurs autres lieux de la capitale comme le Rex d’où nous sommes partis tout à l’heure, ou en Banlieue. Ils n’étaient coupables que de refuser l’application d’un couvre-feu raciste discriminatoire les concernant, en violation même de la constitution. Ils n’étaient coupables que de revendiquer une dignité en refusant d’être considérés comme des sous-citoyens, et enfin, pour réclamer la paix en Algérie.

Jamais on ne répètera assez que ce crime a été perpétré par Maurice Papon, le Préfet de Police de Paris, qui avait mis en place une structure spécialisée avec l’aval du Gouvernement et tout spécialement du Ministre de l’Intérieur Roger Frey et du Premier Ministre Michel Debré. L’un des principaux objectifs de cette mouvance politique était de refuser l’optique d’une Algérie indépendante.

Il faut rappeler que ce Préfet hors norme, Maurice Papon, s’était forgé une expérience, une "spécialité" pendant la seconde Guerre Mondiale : organiser la rafle de juifs. Puis il s’est ensuite distingué dans une répression sanglante d’Algériens le 14 Juillet 1953 avec un bilan de 7 morts à la Bastille à Paris. Il a poursuivi ses exploits Comme Préfet Régional de Constantine, avec les terribles répressions dans le secteur de Philippeville en Algérie au début de cette guerre, et qu’il poursuivra à Paris après 1958. Le 8 février 1962 sera le second crime d’Etat commis sous ses ordres à Paris (nous aurons l’occasion d’y revenir dans les prochains mois). Très tardivement, il sera obligé de répondre de ses actes commis pendant la seconde Guerre mondiale, jamais pour ceux commis à l’encontre des Algériens. Il fut même promu, dans sa carrière politique trésorier du RPR, puis Ministre du Budget sous Giscard d’Estaing.
Le silence officiel sur ce massacre du 17 octobre 1961, ne commencera à n’être vraiment rompu qu’en 2001 date à laquelle le Maire de Paris, Bertand Delanë va faire apposer une plaque sur le mur du Quai de Gèvres, là, à 2 pas, un geste très fort qui, enfin va permettre que sur l’espace public, ce tragique évènement soit visible.

Malgré les incessantes demandes faites par les associations ainsi que les organisations syndicales et politiques, même sous les gouvernements de Gauche comme celui de Lionel Jospin, elles ne franchiront pas le pas de la reconnaissance de la responsabilité de l’Etat dans ce crime. Avec ce 50ème anniversaire, cette exigence est encore plus forte. Sera-t-elle entendue ? On peut en douter avec le Gouvernement actuel.
En effet, Le système sarkosiste s’est délibérément axé sur la reprise du thème de l’aspect positif de la colonisation : ce sont la loi du 23 février 20O5, le discours du 7 février 2007à Toulon ou encore le discours du 26 juillet 2007 à Dakar. Et il n’a pas hésité à réhabiliter et honorer les mouvements nostalgiques de l’Algérie Française, de l’OAS. Je ne citerai que quelques exemples concrets :
-  En faisant défiler sur le mémorial du Quai Banly à Paris, depuis le 26 mars 2010, les noms de 47 victimes de la manifestation de la rue d’Isly, les considérant ainsi comme morts pour la France, il a confondu la notion de "morts pour la France" avec celle de "morts pour l’OAS, contre la France", morts pour avoir tenté de renverser la République.
-  Le 22 octobre 2011 une stèle a été inaugurée à l’intérieur de la caserne de formation des jeunes parachutistes à Pau. Cette stèle honore le Colonel Château-Jobert, ce résistant qui participa au putsch d’avril 1961 qui tenta de renverser la république, déserta pour rejoindre le Maquis de l’Ouarsenis de l’OAS. Ce militaire fut condamné à mort par contumace pour son activité OAS. Quel exemple pour les jeunes militaires !!!
-  Le 5 mai dernier, il éleva au grade de Chevalier de la légion d’honneur à titre militaire Jean-François Collin, le président de l’association Adimad-OAS, association qui revendique 1200 adhérents dont 750 condamnés pour leurs activités au sein de l’OAS. Le passé de ce personnage est éloquent : lieutenant, il participa au putsch d’avril 1961, organisa 2 attentats au nom de l’OAS au sein de l’Hôpital du Val de Grace contre Yves Le Tac. Quel déshonneur pour la République !!!

D’autres exemples pourraient être donnés, démontrant que ce ne sont pas des "accidents" de parcours mais bien une politique délibérée, inquiétante, très inquiétante. Sans faire de parallèles excessifs, d’amalgames exagérés, la xénophobie d’état entretenue actuellement par le gouvernement sarkoziste doit mettre en vigilance tous les militants attachés aux droits de l’homme. Nous ne pouvons oublier que dans le passé, la stigmatisation, la désignation d’ennemis de l’intérieur : les juifs, les tziganes, les communistes, puis les Algériens ont conduit à des pogroms. Certes les reconduites de Roms à l’extérieur des nos frontières alors que ce sont des européens qui devraient donc avoir droit, sans aucune contestation, à une libre circulation au sein de l’Europe, ou des sans papiers pourchassés, d’une façon généralisée, maintenant, des étrangers (et je pense tout particulièrement aux comoriens) désignés comme des dangers… ces actes et propos guidés par un racisme institutionnalisé n’ont pas conduit à des exterminations, mais ils sont des tâches brunes sur l’image qu’avait eu longtemps la France comme un pays défendant les droits de l’homme.

Aussi, 50 ans après ce massacre perpétré dans notre capitale, massacre le plus important de toute l’Europe dans la répression d’une manifestation pacifique, il est plus que temps que les plus hautes autorités de l’Etat reconnaissent enfin la responsabilité de nos institutions à ce sujet, comme d’ailleurs pour le second crime d’état commis lui aussi dans la Capitale le 8 février 1962. Le Collectif Interviendra auprès du Président de la République et du Premier Ministre pour cela dans les prochains jours. Nous arrivons au cinquantenaire de la fin de la Guerre d’Algérie, il serait temps que touts les crimes contre l’humanité comme le colonialisme, ainsi que ceux commis avant et pendant les guerres coloniales du Vietnam, du Cameroun, de l’Algérie avec les tortures, les viols, les crevettes "Bigeard", les corvées de bois, les villages rasés au napalm… soient enfin reconnus comme tels et condamnés. En Algérie, en 2007, Monsieur Sarkozy, vous avez osé dire : "Les jeunes générations n’attendent pas de leurs dirigeants qu’ils se mortifient pour les erreurs passées". Quelle honte, quelle insulte pour les victimes !!! En effet, comment la France peut-elle être crédible, quand son Président, comme il y a quelques jours, s’est exprimé à l’étranger pour donner des leçons de Droits de l’Homme à la Turquie.

Il est indispensable que pour ce 50ème anniversaire de la fin de la Guerre d’Algérie, un vrai traité d’amitié, qui ne sente pas le pétrole ou le gaz, soit enfin mis en œuvre entre les peuples Algériens et Français, sur des bases claires, reconnaissant et condamnant toutes les exactions qui ont assombri le passé.

Par cet hommage aux victimes de ce 17 octobre 1961, pour qu’ils ne soient pas morts pour rien, disons Vive l’amitié entre nos deux peuples Algériens et Français.

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